Gérard Manset – « C’est un parc »

Voilà une chanson qui, à mon sens, illustre très bien la solastalgie, ce sentiment de profonde tristesse que l’on ressent quand on prend conscience des désastres écologiques qui se déroulent sous nos yeux, de la destruction de la diversité du vivant qui rend ce monde si mystérieux et ondoyant. En cinq minutes et dix-neuf secondes d’une immense douceur, après une drôle d’intro déstructurée, avec des mots quasiment enfantins, Gérard Manset dit aussi bien la beauté que la fragilité qui nous entoure.

Quasiment tout le texte est écrit au présent et au futur: le monde est un vaste parc où les humains ont tout pour vivre heureux, en harmonie avec le vivant qui les entoure, et où il leur paraît naturel d’imaginer que leurs enfants et ceux qui les suivront pourront s’épanouir à leur tour.

Mais le dernier verbe des deux refrains est conjugué au passé, pour décrire par avance les souvenirs amers qui nous sont promis: un jour prochain, si tout continue comme aujourd’hui, cette beauté du monde, on ne pourra que s’en souvenir le coeur serré.

« C’est un parc où vont les bêtes,

et l’eau leur coule sur la tête

Au milieu des chevaux légers,

les animaux sont mélangés.

C’est un piège où tomberont

nos enfants quand ils grandiront

(…)

Et quand les chasseurs s’en iront,

à genoux, nous leur chanterons:

C’est un parc où vont les bêtes,

et quelqu’un s’en souvient peut-être,

les fruits trop mûrs, les arbres creux,

c’était le verger du Bon Dieu »

[ « Le paradis terrestre » (Jean Brueghel l’ancien, 1607-1608 / Paris, Musée du Louvre]

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