Sorti en 1989, l’album « Cheyenne autumn » est l’un de ceux que je chéris le plus, pour une foule de raisons.
C’est l’un des premiers CD que j’ai achetés, un peu par hasard, parce que j’aimais la pochette et les titres de plusieurs chansons, et beaucoup parce que j’en avais lu une critique positive dans Télérama…
J’ai alors découvert un auteur-compositeur original, exigeant, ombrageux, romantique, sensible, fougueux, très puissamment inspiré par la nature… Il paraît que dans la vie ce n’est un type pas toujours très agréable (euphémisme), mais peu importe, je suis conquis par son univers musical et sa poésie, surtout dans ses jeunes années (ensuite je trouve que ça s’est effiloché, qu’il écrit trop et qu’il ne fait pas assez de tri dans ce qu’il produit – mais ce n’est qu’un avis personnel).
Dans cet album, plusieurs chansons ont une forte odeur de défaite et de mélancolie: « L’ange déchu » , paradis perdu » , « Pluie d’automne »… et « Le troupeau » , un pur chef d’oeuvre musical et poétique, l’une des merveilles de sa discographie, qui me laisse scotché à chaque écoute.
Jean-Louis Murat est habité par une quête d’absolu, par un intense besoin de paysages ouverts, « d’horizon mauve et d’espace » , de « ciel peuplé d’étoiles » , de communion avec le règne animal, d’une immersion charnelle dans le vivant. Il exprime cela d’une voix aussi désolée qu’une steppe mongole, qui glisse doucement sur de longues nappes de synthé… façon de reconnaître humblement que, pour l’instant en tous cas, rien de tout cela ne lui apporte la paix.
Peut-être un jour ?
Sur les albums suivants en tous cas, notamment sur « Le manteau de pluie du singe » et sur « Live in Dolores » , la voix se fera plus « caressante » et sensuelle, les sons enregistrés dans la nature plus présents encore – et j’aime à croire que ceci explique cela.
En tous cas si j’aime tant « Le troupeau » , c’est, je crois, parce que je me suis tout de suite reconnu dans cette quête, et dans cette angoisse qu’elle soit sans fin et que la paix si ardemment désirée ne soit jamais au rendez-vous.
« Je ne connais qu’une envie / Je veux retrouver mon âme » . Il est plus que temps.
« Je voulais donner mon sang,
ma vigueur et mon audace,
mais sans passion à présent,
Dieu que cette vie me lasse »
« D’avoir mené les chevaux,
d’avoir traversé les glaces
pour me bâtir un troupeau,
n’apaise pas mon angoisse »