Patti Smith – « People have the power » (BO de « Un air de famille »)

Bien qu’elle soit une personnalité très importante dans l’histoire du rock, Patti Smith est une chanteuse dont je n’ai jamais écouté un seul album, et dont je ne connais quasiment pas la carrière. Ce n’est pas que je ne l’apprécie pas, c’est qu’elle n’est pas sur mes radars, c’est tout. On n’a qu’une vie, et on ne peut pas tout écouter. Si vous êtes un paquet à me conseiller des morceaux d’elle, j’irai écouter, promis, et peut-être que je mettrai à l’adorer.

Cela dit j’aime beaucoup ce morceau, que j’ai découvert en 1996 dans le film hilarant de Cédric Klapisch « Un air de famille » .

Vers la fin de la soirée, alors que l’ambiance se tend de plus en plus au sein de cette famille totalement dysfonctionnelle, les deux « pièces rapportées » , à savoir la belle-sœur Yolande (jouée par Catherine Frot) et le garçon de café (joué par Jean-Pierre Darroussin, l’un de mes acteurs préférés), se lancent dans un rock endiablé pour fêter l’anniversaire de « Yoyo » , sous le regard médusé de son mari qui la méprise et l’humilie à tout bout de champ. Le pouvoir de la danse offre à cette femme bien plus subtile qu’elle en a l’air (par exemple c’est la seule à deviner que sa belle-sœur et le garçon de café se connaissent) une occasion de se libérer, l’espace de quelques minutes, après avoir balancé ses chaussures comme on brise des chaînes. Ses rires, ses soupirs, ses gémissements, ses cheveux dénoués et ses remerciements appuyés, à la fin de la danse, expriment puissamment l’excitation et le plaisir que cette femme a pris à oser, à sortir de sa zone de confort.

Je pense à cette scène à la fois ouvertement sexuelle et très drôle à chaque fois que j’entends ce « People have the poooower! » Patti Smith a écrit cette chanson pour inviter chacune et chacun à s’emparer du pouvoir de participer au gouvernement du monde, et en septembre 2020, alors qu’elle avait 70 ans passés, elle l’a chantée à la guitare acoustique dans le métro de New-York afin de mobiliser l’électorat pour expulser Donald Trump de la Maison blanche.

Mais ce que cette scène d' »Un air de famille » nous apprend, c’est que le slogan « People have the power » peut aussi avoir un sens dans nos vies intimes, indépendamment de toute connotation politique. Si nous pouvions déjà nous gouverner nous-mêmes comme nous l’entendons, nous accorder à nous-mêmes du temps et de l’attention, prendre au sérieux notre besoin d’expression et de liberté, et à tout le moins de nous amuser comme bon nous semble tant que cela ne dérange personne, au lieu de nous brimer nous-mêmes et de regarder avec mépris celles et ceux qui prennent le plaisir là où il est (« Il t’en faut pas beaucoup… ») , eh bien je crois que ce serait déjà pas mal.

« The power to dream, to rule,

to wrestle the world from fools »

La scène de danse dans « Un air de famille »:

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