DJ Shadow, de son vrai nom Joshua Paul Davis, est l’un des principaux représentants du mouvement hip-hop expérimental, et il a collaboré avec de nombreux artistes prestigieux comme Thom Yorke (Radiohead) ou Richard Ashcroft (The Verve).
Passionné de mixage, DJ autant que musicien et producteur, il a constitué petit à petit une collection étonnante de 60.000 albums (!), dans laquelle il puise pour produire une musique composée en grande partie de samples qu’il échantillonne lui-même. Son premier album, « Endtroducing » , est même le premier à avoir été composé à 100% à partir de samples.
Cela pourrait donner une impression de « déjà entendu » , mais en réalité c’est plutôt l’originalité qui domine à l’écoute de ces morceaux, qui apparaissent comme des patchworks musicaux.
Tiré du deuxième album (« The private press ») , à peine moins acclamé par la critique que le précédent, « Giving up the ghost » est un magnifique morceau, trépidant et inspiré. Il démarre par des notes de synthé qui tombent comme les gouttes d’une averse frappant le toit d’une remise, et qui sont bientôt rejointes par une rumeur plus lointaine et étouffée. À 1’35, la batterie s’annonce, et après dix secondes de mise en route tranquille pour se chauffer, elle prend subitement le pouvoir sur la rythmique, emportant tout avec elle comme si elle courait à perdre haleine. Il y aura juste une vingtaine de secondes de répit avant que le tambour ne s’impose à nouveau, comme pour battre le rappel. Et juste avant que le silence se fasse, un violoncelle surgit au loin, jouant une mélopée troublante qu’on croirait tout droit sortie de Game of thrones.
J’ai lu quelque part que ce morceau est « un bijou d’abstract hip hop » . Je ne sais pas si l’appellation est encore utilisée maintenant que l’abréviation « trip-hop » s’est imposée, mais en tous cas je la trouve très judicieuse: c’est de la musique abstraite, géométrique, millimétrée, expérimentale, intellectuelle, mais pourtant terriblement entraînante et dansante.