La Marche pour la cérémonie des Turcs a été composée en 1670 par Jean-Baptiste Lully pour la comédie-ballet de Molière « Le Bourgeois Gentilhomme » .
Ce genre, qui combine des comédies parlées, des chants et des scènes dansées, était très en vogue à l’époque (« Le Bourgeois Gentilhomme » était la onzième écrite par Lully et Molière), car il était très apprécié par Louis XIV, qui aimait cette façon de « coudre » ensemble le théâtre, la musique et la danse.
Si je choisis de partager cet extrait ce soir, ce n’est pas que je l’écoute très souvent (j’aime énormément la musique baroque, mais je préfère les messes et surtout les madrigaux): c’est parce qu’il me rappelle un beau souvenir en famille.
Il y a quelques années, au début de l’été, nous avions passé une journée à Versailles pour visiter le château et le parc. En soirée, nous avions profité du feu d’artifice donné au dessus des pièces d’eau, et pendant que nous attendions les premières fusées, des figurants costumés se promenaient dans les jardins, au son de cette Marche pour la cérémonie des Turcs.
J’avais alors été frappé par la force de cette œuvre, par la façon dont, de répétition en répétition, l’instrumentation s’étoffe, se complexifie et gagne en puissance petit à petit. Vers la fin, l’orchestre utilise presque tous les instruments qui existaient à l’époque. Flûtes, violes et percussions créent alors un tourbillon destiné à étourdir et embrouiller monsieur Jourdain (il est persuadé de vivre l’un des plus grands moments de sa vie et de devenir un « mamamouchi » , alors même qu’on est en train de se moquer et de se jouer de lui), et qui provoquent le même effet de vertige sur nous qui les écoutons trois siècles et demi plus tard.
Lorsque j’entends aujourd’hui la Marche pour la cérémonie des Turcs, je suis immédiatement transporté dans ces jardins de Versailles, dans cette délicieuse atmosphère de crépuscule, et dans ces moments en famille.
On reconnaît le bonheur au bruit qu’il a fait en partant…