The Smiths – « Last night I dreamt that somebody loved me »

Cette immense chanson porte à son climax ce qui fait pour moi la magie des Smiths, l’un des groupes les plus fantastiques des années 80.

J’ai découvert ce groupe sur le tard, plusieurs années après sa séparation. Après avoir lu plusieurs chroniques qui faisaient allusion à son héritage, je me suis laissé tenter par une double compilation. J’ai tout de suite été ému et conquis, à tel point que je me souviens très exactement de quand et où j’ai fait cet achat, et de quelles chansons m’ont tout de suite bouleversé (« Heaven knows I’m miserable now », « Please Please Please let me get what I want », « There is a light that never goes out », « Reel around the fountain », « Half a person », « Girlfriend in a coma », « The boy with the thorn in his side »…)

Les Smiths ne pouvaient que me percuter, car c’est par excellence LE groupe du malaise adolescent, de la découverte fébrile de nouvelles émotions, et même si j’avais dépassé les vingt ans, j’étais encore bien englué dans tout cela.

À travers presque toutes leurs chansons, le duo Johnny Marr / Morrissey décrit de façon poignante ce qui se tapit au plus profond de chacun de nous (ou presque), derrière nos airs assurés, nos occupations et nos projets dont on s’efforce de croire et de faire croire qu’ils sont importants: des blessures, des fêlures, des fragilités, et une demande d’amour et de consolation parfois si vive qu’on a alors la conviction qu’elle sera de toutes façons impossible à satisfaire (« Notre besoin de consolation est impossible à rassasier« , c’est le titre d’un petit essai du philosophe suédois Stig Dagerman, qui s’est suicidé deux ans après l’avoir publié…)

Ce n’est pas étonnant que j’aie tant aimé ce groupe, et que je l’aime toujours autant: il parle de ce que j’ai vécu, de ce qu’il est si difficile de dépasser – peut-être aussi du miracle que c’est quand on y arrive petit à petit.

« Last night I dreamt that somebody loved me » fait partie de mes chansons préférées des Smiths. La longue introduction brumeuse, avec des sons dérangeants qui ressemblent à un brouhaha de cris de détresse… L’arrivée à 1’54, du chant et de tous les instruments organiques du rock (batterie, basse et guitares), qui se mettent subitement à l’unisson… La voix précise et poignante de Morrissey, qui finit par des plaintes aériennes…

Et puis il y a ce texte, qui parle d’une soif d’amour inextinguible, chez un jeune homme qui en a si peu reçu qu’il n’est pas (pas encore ?) capable de s’en offrir à lui-même, pas encore capable d’épancher ne serait-ce qu’un peu de cette soif d’amour à sa propre source.

Ce texte, je l’ai écouté et chanté tant et tant de fois, souvent avec des sanglots… Il est tellement beau et pur que même sans musique il est impressionnant et déchirant.

« Last night I dreamt

that somebody loved me

No hope, no harm,

just another false alarm

Last night I felt

real arms around me

No hope, no harm,

just another false alarm

So, tell me how long

before the last one ?

And tell me how long

before the right one ?

The story is old – I KNOW

but it goes on »

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