Jean-Louis Murat – « La chanson de Dolores »

Voici ma chanson préférée de Jean-Louis Murat. Dire que je l’aime serait trop fade, et même que je l’adore: je me prosterne devant elle comme devant une divinité mystérieuse et fascinante. Je dois bien l’avoir écoutée cent fois, presque toujours en la chantonnant, et toujours chaviré par tant de beauté et de volupté.

« La chanson de Dolores » est parue sur l’un des six albums enregistrés en concert par Jean-Louis Murat, « Live in Dolores » . Parmi les caractéristiques originales de cet album, il y a le fait que la batterie en est absente. Ça n’a l’air de rien, mais ça change tout, car on dirait que ce sont les chansons qui prennent la main, qui glissent et se déploient librement, à leur rythme, et qui entraînent JLM vers les sommets (d’Auvergne, bien entendu). Je n’en dirai pas plus sur l’album, car je l’ai déjà présenté en détail en jour 284, à l’occasion du partage d’un autre de ses joyaux, « Perce-neige » .

Pour ce soir, j’ai d’abord envie de mettre en avant le chant de Jean-Louis Murat. Sa voix est grave et chaude, cotonneuse, antalgique, émolliente, et d’une sensualité sidérante. Sur cette chanson en particulier, il est le chanteur qui murmure à l’oreille des filles, qui les excite délicatement, et qui pour finir leur fait l’amour avec sa voix, dans une espèce de Cantique des cantiques vocal. Ce n’est pas lui qui chante et dont on entend les soupirs profonds à chaque respiration, c’est Aphrodite.

Le texte aussi est troublant et voluptueux, d’autant plus que Jean-Louis Murat l’a écrit au féminin. Il y est question d’une « vague déferlante d’amour » qui « éclabousse de façon cavalière » , d’une « valse irrégulière » , de « surprise« , de « joies » … Moi qui n’aime pas spécialement la poésie, je suis emporté par cette plume aussi élégante qu’allusive et charnelle, et je me dis que si cela c’est de la poésie, alors j’en suis raide dingue.

Quant à la musique, elle se résume à peu près à un entrelacement molletonné de vagues de synthé, de nappes de synthé et de plages de synthé. Cette torpeur suffit à magnifier des mélodies qui montent et descendent lentement comme une respiration ventrale, qui vont et qui viennent avec souplesse.

« La chanson de Dolores » est l’une des chansons les plus sexuelles que je connaisse. Mais contrairement à ce que Jean-Louis Murat laisse lui-même tomber à 3’16 (« Tout me paraît vulgaire » ), je la trouve sublime et majestueuse, notamment le final qui s’élance à partir de 3’54, pour une arrivée en haute altitude.

Élégance et sensualité s’entrelacent aussi bien dans la voix que dans la mélodie, l’orchestration, le texte…

À chaque écoute, j’en reste pantois.

« La vague déferlante d’amour

nous éclaboussa ce jour

de façon cavalière

Au bal où nous invita l’amour

à danser pour toujours

sa valse irrégulière

Et depuis, parée de cet amour,

j’ai dansé tour à tour

tous les chants de la terre

Surprise en décembre, en juillet,

partout où nous menaient

des joies similaires »

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