Altercoupedumondedefootball (jour 10) – Le Barça, « Mes que un club »

Si le FC Barcelone est mon club préféré en dehors des frontières de l’hexagone, c’est notamment pour la dimension politique et sociale qu’il a toujours remplie au cours de son histoire, et qui en fait « bien plus qu’un club » (« Mes que un club » ): une véritable institution.

Au-delà de son palmarès (26 championnats d’Espagne, 31 coups d’Espagne, 5 Ligues de champions…), au-delà de la pléiade de talents qui ont porté le maillot blaugrana (Kubala, Kocsis, Cryuff, Maradona, Romario, Stoichkov, Guardiola, Ronaldo, Ronaldinho, Xavi, Iniesta, Messi, Ibrahimovic, Eto…), le Barça illustre la passion pour le « beau jeu » , celui où l’habileté technique et le sens du collectif sont la base, celui où on pense non seulement à gagner mais aussi à bien jouer, à oser, à prendre des risques et à donner du plaisir dans les tribunes.

Cette spécificité du Barça tient notamment à la personnalité de deux de ses entraîneurs, Johann Cruyff à la fin des années 1980 et Josep Guardiola autour de 2010. Tous les deux sont adeptes de ce que Rinus Michels a appelé le « football total » , et le second a toujours approuvé ce qu’a dit le premier: « La qualité sans les résultats est inutile. Les résultats sans la qualité sont ennuyeux » .

Bref, si le Barça est « plus qu’un club » , c’est d’abord parce que pour ses socios, les lignes sur le palmarès ne suffisent pas.

Mais la formule « Mes que un club » renvoie aussi au fait que le Barça est l’un des symboles et des porte-drapeaux de la lutte des républicains contre le franquisme, puis du combat des Catalans pour leur autonomie linguistique, culturelle et politique.

Dès le début de la guerre civile en 1936, plusieurs joueurs barcelonais ont pris les armes dans le camp républicain, et le président du Barça, Josep Sunyol, a été arrêté et fusillé par l’armée de Franco. En 1937, le club a effectué une tournée en Amérique du Nord, durant laquelle il a été reçu comme un ambassadeur de la Seconde République espagnole.

Après avoir bombardé Barcelone dans la nuit du 16 mars 1938, faisant plus de 3.000 morts, l’armée franquiste a pris la ville et s’est employée à éradiquer les particularismes culturels et politiques de la Catalogne. Le Barça a fait partie des principales cibles: son nom a été changé en Club de Fútbol Barcelona, le drapeau espagnol a remplacé le drapeau catalan à quatre bandes rouges sur l’écusson, et un collaborateur de Franco a été imposé comme président. Pour les Catalans, cette volonté d' »espagnoliser » le Barça a été une manifestation tangible de l’oppression culturelle, si bien que le club est devenu depuis l’un des symboles du catalanisme.

Dans un discours prononcé en 1968, le président du Barça Narcís de Carreras a déclaré qu’il est « quelque chose de plus qu’un club de football » . De là vient sa devise actuelle (« Mes que un club » ), qui est on ne peut plus vraie.

Jusqu’à il y a quelques années, le Barça offrait l’espace de son sponsor maillot à l’UNICEF, s’asseyant ainsi sur un paquet de dizaines de millions d’euros par an. Depuis il est rentré dans le rang – le foot-business est un univers impitoyable. Mais je garde de l’affection pour ce club, et j’aime encore beaucoup le voir jouer.

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