[Le partage musical de ce soir est dédié à une amie dont l’une des amies très proches est décédée ce matin, après une longue agonie… Je pense à toi.]
Issu du superbe album « Magic and loss » (1992), tout entier consacré à la maladie et à la mort, et inspiré par la lente et douloureuse agonie de deux de ses amis, Lou Reed y aborde un thème rarissime en chanson: non seulement l’approche de la mort (comme Bob Dylan l’a fait superbement dans « Knocking on heaven’s door » ), mais le souhait d’être emporté par la mort pour échapper à la maladie et à son cortège de souffrances.
Dans son texte, magnifique, récité sur un tempo très lent et simplement accompagné par deux guitares en plein recueillement, Lou Reed donne ici la parole à un corps souffrant qui se sait condamné, qui n’en peut plus (« I hate this painful body » ), et qui adresse une prière au docteur pour qu’il se transforme en magicien et qu’il le délivre enfin (« Magician take me upon your wings, and gently roll the clouds away« ; « I want some magic to sweep me away« ; « Release me from the body » ).
Ce n’est pas d’euthanasie ou de suicide assisté qu’il s’agit ici, mais bien de magie. Car ce malade ne souhaite pas être anéanti totalement: il se sent encore vivant, encore plein d’énergie, et il voudrait encore prolonger les jours de son esprit (« Inside I’m young and vital« ; « I want some magic to keep me alive » ). La mort lui semble d’autant plus cruelle, incompréhensible et scandaleuse… et comme il n’est pas croyant, il ne reste à ce malade que le sentiment du tragique.
Ce qu’il désire, au fond, ce n’est rien d’autre que la paix de l’âme, et c’est un désir que l’on peut toutes et tous éprouver, sans qu’il y ait pour cela besoin d’être au voisinage de la mort.
Lou Reed met ici superbement en musique un thème éternel de la philosophie morale: le meilleur point de vue sur la vie, c’est la mort.
« Fly me through this storm
And wake up in the calm
I fly right through this storm
And I wake up in the calm »