Composées en 1897, les danses de travers sont beaucoup moins connues dans l’oeuvre d’Erik Satie que ses trois gymnopédies et ses six gnossiennes. Personnellement je les trouve tout aussi belles, tout aussi simples, mélancoliques et génialement mélodiques, et j’y retrouve tout ce qui me plaît chez lui.
Ce sont trois pièces très brèves, trois variations sur un même thème, qui s’enchaînent au point de n’en former en réalité qu’une seule (5’18 au total dans cette version).
Ces trois morceaux sont construits autour d’arpèges dépouillés de piano joués à la main gauche, qui donnent, comme souvent chez Satie, l’impression d’une personne qui titube mais qui avance quand même, d’une démarche bancale. L’hésitation qu’il met ici en musique, notamment produite par le décalage entre les mélodies jouées à la main gauche et à la main droite, se repère aussi aux titres de ces trois courtes pièces: « En y regardant à deux fois » , « Passer » , « Encore » . La structure répétitive de ces « Danses de travers » leur donne enfin un côté légèrement hypnotique, subtilement séduisant.
La vie, au fond, est-elle autre chose qu’une danse de travers?
Nous y cherchons notre chemin sans jamais être bien certains de ce que nous allons y rencontrer, à quel moment ou à quel endroit il faudra poser nos valises, ni même si c’est bien raisonnable d’aller dans cette direction plutôt que dans telle autre. Comme dans ces « Danses de travers » , nous avançons à tâtons dans la pénombre – avec la musique, parfois, pour éclairer notre chemin.