Aujourd’hui c’est le cinquantième anniversaire du monument de Pink Floyd, « The dark side of the moon » . Un demi-siècle, ça se fête! Alors après « The great gig in the sky » et « Time », voici un troisième partage de cet album, avec le planantissime « Breathe » .
Étant donné la façon dont les morceaux s’enchaînent les uns dans les autres dans cet album concept, mais aussi les renvois d’un morceau à l’autre, il est malaisé d’indiquer quand cette chanson commence et quand elle finit. Dans la version vinyle elle dure 2’40, mais elle est accolée au premier titre « Speak to me » , et elle est suivie sans le moindre accroc par « On the run » , qui en est le prolongement. Si on l’isole, comme sur cette vidéo, elle commence et elle finit donc d’une manière très brutale, qui est totalement aux antipodes de la fantastique impression de fluidité et de légèreté qu’elle offre.
« Breathe » démarre par une longue introduction instrumentale de 1’15, sur un tempo lent, calme et doux, avec une rythmique très simple, quelques accords d’orgue, et de superbes improvisations de David Gilmour à la guitare.
Lorsque la voix de Roger Waters apparaît, c’est pour transmettre à un nourrisson la principale leçon de vie que croit avoir comprise un vieil homme: le temps passe vite, et si tu ne le remplis que par le travail et les occupations sociales, ce sera aussi vain et vide de sens que si tu te consacrais à creuser des trous (« Dig that hole, forget the sun / And when at last the work is done, / don’t sit down it’s time to dig another one » ). Cette réflexion sur le temps qui passe, sur le caractère totalement absurde de la vie que mènent tant d’humains, et sur la mort qui est au bout (« You race towards an early grave » ), font de « Breathe » une chanson pleine de gravité.
Mais ici le texte n’a que peu d’importance au regard de la musique incroyablement planante, de ces nappes de synthé et de guitare qui évoquent le calme absolu de l’espace sidéral. La fusée Pink Floyd a décollé, elle a pris son allure de croisière et on y est confortablement et moelleusement installé, dans une totale sérénité. « Breathe » est d’ailleurs construite sur des alternances de montées et de descentes, douces et infatigables, qui semblent évoquer la respiration ventrale, ample, profonde et apaisante.
Mais si « Breathe » est une chanson qui invite à nous envoler, ce n’est pas seulement pour profiter de l’ivresse de voler: c’est aussi, je crois, pour observer avec attention le spectacle du monde, et pour mieux choisir l’endroit où l’on va atterrir, et ce que l’on va y faire…
« Look around, choose your own ground »