Archive – « Controlling crowds »

Sorti en 2009, le septième album du groupe anglais Archive est un album concept dont le titre, qui signifie littéralement « contrôler des foules », résume bien le projet: il s’agit de mettre en musique la façon dont toute société organise la domination et le contrôle des individus, en les justifiant par toutes sortes de constructions religieuses, philosophiques, culturelles ou politiques. Dans une interview, les membres du groupe ont expliqué que l’album défend, à rebours de cette tendance, un désir « d’aborder la vie d’une façon simple et instinctive. »

Musicalement, l’album marque un rapprochement avec les sources trip-hop et rap d’Archive, du fait du retour du rappeur Rosko John et du départ du chanteur Craig Walker, qui avait entraîné le groupe vers les distorsions électroniques et le rock progressif.

Ce n’est pas mon album préféré d’Archive, mais il contient néanmoins quelques très beaux morceaux, dont « Bullets » (que je partagerai un peu plus tard), et la chanson titre « Controlling crowds » .

Celle-ci, à vrai dire, n’est pas si instinctive que cela. Elle correspond même à l’envie des membres du groupe d’évoluer « vers un style science-fiction« : on y entend un rythme mécanique, un sample saccadé, une pulsation électronique, une ligne mélodique qui serpente sur un rythme binaire, une batterie au son indus, des nappes synthétiques… Au fur et à mesure que le morceau avance, des couches d’instruments et de bruitages sont rajoutées, ce qui donne l’impression que la mélodie initiale se réinvente et se redéploie dans de nouvelles directions. Tout cela forme une atmosphère glaciale, clinique, distante, sombre, martiale.

Cette impression est redoublée par le chant de Pollard Berrier, rageur et revendicatif. Les premiers mots de la chanson (et de l’album) donnent le ton: « Why are we so scared and creeping around / hidden from mirrors and screens all around town? » Dans la suite du texte, comme souvent très obscur, il s’agit de crainte, d’intimidation, de méfiance, de paranoïa, de populations indifférentes ou carrément amorphes, et de la volonté obstinée de ne pas se soumettre à quoi que ce soit. Cet univers mental me fait penser à ces innombrables films de SF (par exemple « Terminator »), qui décrivent un univers concentrationnaire à venir, et qui mettent à l’honneur l’acharnement à ne pas s’y laisser happer.

La méfiance et la colère, ce n’est vraiment pas le genre d’état d’esprit que j’aime rencontrer chez les gens que je côtoie. Mais c’est quand même bon de se connecter de temps à autre à cette énergie farouche, surtout lorsque l’actualité ne cesse de nous mettre sous les yeux la dérive sécuritaire de l’État et la façon dont il stigma

tise et réprime celles et ceux qui refusent de s’accommoder du désastre et de l’injustice.

« The world is my playground too and I’ll do what I like.

(…)

« The world is my playground too and I refuse to follow. »

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