Après cinq albums au son souvent minimaliste et aux textes écorchés vifs, dont un impressionnant chef d’oeuvre (« What would the community think » en 1996), Cat Power, de son vrai nom Charlyn « Chan » Marshall, publie en 2006 un album beaucoup plus apaisé (dans les sonorités en tous cas), très inspiré par la folk et par la soul. Certains fans de la première heure ont détesté ce disque en l’accusant d’être fade, aseptisé, voire mièvre. Il est certain qu’on est ici bien loin des chansons poignantes et à l’os chantées par une Cat Power au bord de l’hallucination, telles que l’extraordinaire « Nude as the news » …
Mais on ne peut pas toujours vivre et créer sur la corde raide, nous avons aussi besoin de paix. Peut-être que Chan Marshall en a eu assez d’être une grande brûlée de la vie, peut-être qu’elle a réussi à s’émanciper un peu du malheur? En tous cas il est un fait que « The greatest » a clairement un goût de sortie du tunnel.
« Willie » est tout à fait caractéristique de l’ambiance musicale ce disque. J’aime beaucoup ce morceau enveloppant, son côté chaloupé et mélancolique, son je-ne-sais-quoi de bluesy (même si ce n’est pas joué dans la gamme blues, merci Élodie pour la confirmation!)…
La chanson s’ouvre par les accords d’un piano au son clair et net, et elle se déploie en trouvant tout de suite son rythme de croisière, qu’elle ne lâchera plus pendant ses presque six minutes.
À chaque fois que je l’écoute, je me laisse bercer par son swing et je me mets à chantonner en improvisant, en tournoyant autour de cette mélodie répétitive et élégante, comme si ma voix était l’un des instruments de ce petit orchestre intime.
Je ne classerais pas « Willie » parmi les grandes chansons, loin de là. Mais c’est assurément l’une de celles qui parvient le plus à me faire me sentir léger (ce qui est parfois un bel exploit). Alors rien que pour ça, j’ai envie de remercier Charlyn Marshall.
« I tell you there are some people living alone
I tell you there are some people with nowhere to go
There are some people who don’t believe in love
Willie and Rebecca proved them all wrong »