Durant ma première année en musique, j’ai chroniqué ce qui est pour moi le chef d’oeuvre d’Oasis, « Live forever « . J’y avais notamment décrit les incorrigibles manières de bad boys des frères Gallagher, bouffis d’orgueil, grossiers et ingérables en interview, toujours à deux doigts de s’insulter voire de se battre (et parfois pas qu’à deux doigts)…
L’une des manifestations les plus drôles de ce tempérament disons particulier, c’est la facilité avec laquelle les membres d’Oasis trouvaient des punchlines hilarantes pour dézinguer leurs concurrents directs dans la Premier League de la britpop. Par exemple celle-ci, prononcée en interview par Noel Gallagher en 1994: « Pour pouvoir tirer un coup, il faut écrire de bonnes chansons. Et je peux te dire que les mecs d’Happy Mondays ne doivent pas baiser très souvent en ce moment. »
Ce n’est pas très sympa pour les Mondays (que j’aime beaucoup par ailleurs), mais si on suit ce raisonnement, la chanson que je partage ce soir a sûrement permis aux membres d’Oasis de tirer quelques coups, car elle est sacrément bonne.
« Supersonic » figure en plein milieu du premier album d’Oasis, « Definitely maybe » , sorti en 1994, et qui est pour moi l’un des meilleurs de la décennie, en tous cas l’un des plus grisants et jubilatoires. Un disque avec lequel Oasis déboule dans l’industrie musicale sans se soucier le moins du monde de mettre les formes. Enfiler les patins pour ne pas salir le parquet, ce n’est pas leur genre: eux posent leurs baskets boueuses directement sur le canapé, sans complexe, comme des gougnafiers, et tant pis si la maîtresse de maison s’étrangle face à un tel manque de savoir-vivre.
« Supersonic » est une chanson insolente et hargneuse, qui saute à la gueule, comme Oasis savait à l’époque en composer et en enregistrer, avec toute la fougue et la prétention propres à la jeunesse. Elle commence par une introduction à la batterie reconnaissable en une demi-seconde, et une fois que le reste du groupe s’est mis en action, c’est parti pour de longues et sinueuses phrases de guitares au son métallisé et pour un chant plein de morgue, qui prend de haut le reste du monde, jusqu’à un final déglingué (le fameux solo de guitare de Noël Gallagher).
Le texte, lui aussi, frappe fort d’emblée, par quelques mots claqués comme un étendard: « I need to be myself / I can’t be no one else / I’m feeling supersonic« .
Vous avez dit boulard? Je leur pardonne, parce que qu’est-ce que c’est bon à écouter!