Pierre Perret – « Lily »

« Lily » était la chanson préférée de mon grand-père paternel, qui la chantonnait très souvent de sa voix claire.

Il faut dire que sa Lily à lui, c’était ma grand-mère, une petite italienne du Frioul arrivée en France à même pas 10 ans. Ada Quargnul, elle non plus, n’a pas eu la vie facile jusqu’à ce qu’elle se marie. Elle fut « bonniche » , comme elle le disait elle-même, dans une famille de la riche bourgeoisie arrageoise, avec des levers aux aurores et des journées harassantes à courir au devant du moindre désir de ses employeurs, tout ça pour un salaire de misère.

Lorsque tous les deux se sont trouvés, ils ont commencé une longue vie commune bien rangée, avec des rôles sexués bien traditionnels. Elle a continué à être au service, simplement c’était à celui de son mari et des enfants, puis de ses petits-enfants: son bonheur était de pourvoir à celui des autres. Je crois ne jamais être arrivé chez elle sans qu’elle ait commandé des yaourts Mamie Nova, cuisiné un lapin aux haricots verts et préparé ses fameuses gaufres craquantes.

Contrairement à mon grand-père qui aimait prendre la lumière et être au centre des attentions, elle était modeste et effacée, à tel point que je n’ai que quelques photos d’elle – et pourtant c’était bien elle le pilier de la famille.

Aujourd’hui même, cela fait 22 ans que la Lily de mon grand-père nous a quittés et qu’elle réside au « boulevard des allongés » , comme elle s’amusait à le dire quand on passait devant un cimetière. Jusqu’au bout, ma mémé de Villers m’a appelé « Nain-nain » , alors que je mesurais 30 cm de plus qu’elle. Je l’aimais. Elle me manque toujours autant, d’autant plus que l’amour qu’elle me portait était totalement inconditionnel – et c’est avant tout de ça dont a besoin un enfant.

Lorsque au hasard de ma playlist j’entends cette chanson de Pierre Perret, le petit garçon que j’étais fait irruption en moi en une fraction de seconde…

« On la trouvait plutôt jolie, Lily

Elle arrivait des Somalies, Lily

Dans un bateau plein d’émigrés

Qui venaient tous de leur plein gré »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *