John Coltrane & Johnny Hartman – « They say it’s wonderful »

Écrite par Irving Berlin en 1946 pour une comédie musicale (« Annie get your gun » ), ce standard de jazz raconte une histoire merveilleusement simple, merveilleusement belle et merveilleusement excitante: « Falling in love is wonderful » .

La subtilité, la touche de séduction, viennent du fait que ce n’est pas affirmé de façon frontale et assurée, mais comme si c’était une rumeur, un mythe, une légende urbaine, en tous cas un espoir que l’on caresse en frissonnant, un rêve éveillé qu’on laisse se dérouler dans sa tête, mais auquel un soupçon d’inquiétude empêche de croire tout à fait.

« They say falling in love is wonderful » : mais est-ce qu’ils ont vraiment raison de le dire? Tomber amoureux est délicieux, c’est entendu, et comme une personne chère à mon coeur me l’a écrit il y a peu, cela remplit la tête de visions de comédie musicale avec des voisins qui sortent de chez eux en dansant quand on passe devant leur porte, des gens qui font des claquettes en traversant la rue, des collègues qui nous accueillent en chantant quand on arrive à notre travail… Mais être transpercé ainsi par cette douce euphorie, est-ce que ce ne serait pas aussi une menace pour notre tranquillité, peut-être même un coup de malchance, ou pire encore un grand malheur? Alors est-ce que c’est vraiment une bonne idée de s’y abandonner?

Au-delà du texte lumineux et plein de transport romantique, ce qui répond à la question ici, c’est aussi le duo formé par la voix de Johnny Hartman et le saxophone tenor de John Coltrane. Tous les deux sont aussi graves et souverains l’un que l’autre, et ils nous offrent un morceau fait de velours et de satin, pour illustrer un amour naissant qui excite et envole tout autant qu’il sécurise et apaise. Un amour à la fois enthousiasmant et rassurant, randonnée vers les cimes vertigineuses autant que port d’attache au creux d’une petite crique tranquille.

« They say it’s wonderful » est par excellence le morceau propice pour accompagner les rapprochements fiévreux, les regards qui s’embuent et qui plongent l’un dans l’autre, les doigts qui s’entremêlent, les premiers baisers…

Pour ma part, je n’ai aucun doute qu’il soit merveilleux de tomber amoureux. Lucky me. À nous de faire en sorte que ce soit merveilleux de le rester, et de le rester pour longtemps.

« You leave your house one morning

and without any warning,

you’ll find yourself shoutin’ that love is grand, and

to hold your girl in your arms is wonderful,

wonderful in every way »

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