J’ai déjà partagé trois chansons du merveilleux album enregistré en 1991 par William Sheller, « en solitaire », avec son piano pour seul compagnon: « Petit comme un caillou », « Maman est folle », et bien sûr « Un homme heureux ».
Ce disque est l’un de ceux qui me touchent le plus, et c’est peut-être l’un de mes dix préférés. Il n’y a pas un seul de ses morceaux que je peux écouter distraitement, à chaque fois je suis happé et je ressens instantanément une grande émotion, avec l’impression que des cordes intérieures sont en train de vibrer. Plus précieux encore, ce disque est de ceux qui font que la musique me reconnecte à des parties de moi que j’ai trop l’habitude de négliger, qui réclament de la compréhension et de la douceur, et qui soudain parviennent, par la grâce de la musique et des mots sensibles de William Sheller, à capter enfin mon attention. Écouter « En solitaire », c’est avoir une occasion de se retrouver seul avec soi-même, et de se recentrer sur ce qui compte le plus. En tous cas c’est l’effet que ça me fait.
« Un endroit pour vivre » est de ces chansons qui me serrent le cœur en mettant des mots sur mon besoin de trouver enfin ma place quelque part.
J’ai souvent l’impression d’être ballotté par la vie, et en tous cas je subis douloureusement le fait d’être éloigné des mes proches, d’être incertain sur le sens et la pertinence de la vie que je mène et des efforts que je réalise sur mon lieu ou dans mon travail. Comme le chante ici William Sheller, « J’déambule tout bas, gentiment inutile« …
Alors je ressens vraiment très fort le besoin de me dire que ça y est, je suis installé dans un endroit où je me sens bien, apaisé, calmement enraciné, entouré par des gens que j’aime et qui m’aiment.
Je sais bien que cet endroit, ça peut être n’importe où, car comme l’a écrit Marc-Aurèle avec son génie coutumier, « Là où il est possible de vivre, il est possible de bien vivre » (Pensées pour moi-même).
Je sais bien aussi que cet endroit, ça peut être celui où je suis maintenant installé depuis quatre ans et demi, et que j’essaye d’aménager et de transformer en petit paradis végétal. Je ne sais pas si je vais y passer le reste de ma vie. Je ne sais pas non plus, si j’y passe le reste de ma vie, avec qui et comment elle se déroulera. J’espère simplement qu’il y aura, où que ce soit, ici ou ailleurs, l’envie de « chanter des mots » et « le rêve tranquille d’un môme qui dort« , comme dans cette chanson à la magie désarmante.
« Ce s’rait p’t’être là un endroit pour vivre. »