Encore une belle découverte sur l’excellent poscast musical Happy Monday, que vous pouvez suivre sur Spotify 🙂
Nilüfer Yanya est une chanteuse, compositrice et guitariste britannique, née en 1995 d’un père turc et d’une mère à moitié irlandaise et à moitié barbadienne.
C’est ce métissage, peut-être, qui explique son goût pour l’expérimentation et pour l’éclectisme. Son premier album, « Miss Universe » , date de 1998, mais en dépit de son titre aguicheur, elle n’y cède pas à la facilité d’exploiter les dons que la nature lui a offerts (une plastique affriolante et une voix suave) : elle y fait preuve d’assez de confiance en elle pour oser le bricolage musical et parfois même l’improvisation, avec aisance et de brio.
Dans ces premières années, Nilüfer Yanya a notamment été repérée pour son étonnante reprise d’un morceau des Pixies, « Hey » . Du morceau sec et nerveux de la bande à Franck Black, elle avait fait une ballade chaloupée, dans laquelle sa voix se dandinait sur un rythme jazzy, presque soul.
Au début de cette année, le single « Like I say (I run away) » avait totalement changé de couleur musicale, avec une inspiration oscillant entre le grunge et la noisy pop.
Je n’ai pas encore écouté en entier l’album qu’elle vient de sortir (son troisième), mais le premier single que j’en ai entendu m’a immédiatement scotché, notamment pour l’électro élégante, pour la profondeur de la basse, pour le mélange de fragilité et de classieuse désinvolture dans la manière de chanter, pour la précision de la rythmique, qui claque de façon à la fois sèche et douce (comme à la fin de « Videotape » de Radiohead et dans beaucoup de titres de The National)… À 1’01, le riff de guitare léger évoque irrésistiblement XX, que j’aime beaucoup aussi, avant que le morceau parte quelques secondes dans des nappes de synthé langoureuses, puis dans des choeurs angéliques, puis dans quelques vagues de cordes doucereuses… À 3’29, Nilûfer Yanya se permet d’interrompre soudain la chanson pendant quelques secondes, avant de le relancer par une drôle de corne de brume électro, puis de le clôturer d’un coup sec…
« Mutations » est un morceau kaléidoscopique, à la construction méthodique, dans lequel Nilüfer Yanya semble nous bander les yeux avant de nous prendre la main et de nous guider exactement là où elle veut nous emmener.
Le côté multiforme de ce single est tout à fait assumé par Nilüfer Yanya, qui l’a présenté ainsi dans une interview : « « Mutations » traite du changement provoqué par les circonstances. Ce n’est pas le phénix renaissant de ses cendres, mais le changement subtil qui se produit constamment alors que des millions de petites décisions et actions façonnent votre être. »
C’est bien l’impression que me laisse ce morceau, qui semble changer plusieurs fois de texture sonore et directions, et de façon fort subtile en effet (il faut saluer la production et le mixage pointilleux). Cette pop est intelligente, originale, audacieuse, déroutante, brillante. Elle est aussi et surtout magnifique, vraiment magnifique.
« Was it hard to stay? »