Je n’ai pas vu beaucoup de commentaire sur cette publication, qui devrait pourtant susciter pas mal de sueurs froides parmi les élu·es des collectivités locales et parmi les décideurs et les décideuses politiques et économiques.
La SCET n’est pas un repaire de zadistes chevelus et anti-capitalistes : c’est une filiale de la Caisse des dépôts (CDC) qui est spécialisée dans le conseil aux collectivités, et qui emploie plutôt des personnes formées à la finance et qui portent le tailleur ou le costume.
Elle vient de publier une étude intitulée L’assurabilité des territoires, une affaire d’État ? (rien que ça!), et dont la thèse générale est la suivante : « Sous l’effet du changement climatique, des tensions budgétaires et d’une volatilité accrue des risques, se joue une crise systémique d’assurabilité : comment protéger durablement nos territoires, leurs habitants et les entreprises ? »
Le secteur de l’assurance des collectivités locales ne compte en France que deux acteurs, Groupama et la Smacl, une filiale de l’assureur mutualiste MAIF qui a frôlé la faillite fin 2023. Ces deux sociétés sont fortement mis sous pression du fait de l’aggravation des conséquences du changement climatique : en 2024, le coût pour les assureurs des événements climatiques en France a atteint cinq milliards d’euros, ce qui est moins que la moyenne 2020-2024 (5,6 milliards), mais beaucoup plus que la moyenne des années 1982-1989 (1,5 milliard).
En réaction, les assureurs augmentent le coût des primes d’assurance : elles ont été multipliées par 2 à 4 selon les communes (!!!), qui plus est avec très souvent une baisse des garanties. Parfois même les contrats d’assurance sont résiliés de façon unilatérale, « parfois sans justification et avec des délais de préavis insuffisants » . Et bien souvent, les communes concernées ne peuvent pas trouver un nouvel assureur, « en raison de l’absence de réponse aux appels d’offres » .
Il est à noter que le problème ne concerne pas que quelques petites communes isolées (ce serait trop simple) : la SCET estime que 5.100 communes « cumulent (une) forte exposition à la hausse des risques climatiques » et une situation financière tendue !
Selon le comparateur d’assurances Lelynx.fr (« Des régions françaises bientôt inassurables ? » ), une tendance similaire se repère pour l’assurance habitation. Ici « les zones les plus touchées se concentrent dans le Sud-Ouest et sur la façade méditerranéenne, où les prix d’assurance habitation atteignent d’ailleurs des niveaux records« . Là aussi, « La hausse des primes sur les dernières années est très fortement soutenue par l’augmentation des catastrophes naturelles et des événements climatiques« . « Et la tendance n’est pas près de s’inverser. Alors que les sinistres habitation liés au climat représentaient 10 à 20% du total il y a 25 ans, ils en constituent aujourd’hui 50 à 60%. » (!!!)
À part ça on a encore des élites (?) politiques et économiques, et même un prix Nobel d’économie, qui pensent qu’il faut alléger les contraintes environnementales qui entravent le développement économique, comme si celui-ci n’allait pas avoir des conséquences de plus en plus désastreuses sur le climat… et donc sur son existence même.
Un tel aveuglement volontaire, une telle obstination à persévérer dans ce suicide collectif qu’est la société industrielle et productiviste, ne cesseront jamais de m’étonner et de me consterner.


